Regard croisé de Christophe Harrigan, Directeur Général de La Mutuelle Générale et d’Olivier de la Chevasnerie, Président de Réseau Entreprendre sur les nouvelles formes d’organisation en entreprise et les nouveaux équilibres entre vie professionnelle et vie personnelle.

Avec la crise du Covid, nous constatons une accélération des nouvelles formes de travail. Comment voyez-vous cette évolution ? Pensez-vous qu’elles seront durables ?

Christophe Harrigan : La crise sanitaire que nous avons connue en 2020 a été le catalyseur d’une tendance qui avait commencé à émerger, et qui consiste à placer l’enjeu d’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle assez largement au-dessus de beaucoup d’autres enjeux. Le télétravail, qui était jusque-là l’apanage de quelques cadres supérieurs privilégiés ou une expérimentation menée par quelques entreprises avant-gardistes, est devenu le modèle que tout le monde veut désormais privilégier, entreprises comme salariés. Je suis convaincu que ces tendances sont durables et obligent l’ensemble des entreprises et des entrepreneurs à se positionner par rapport à cet enjeu.

La crise du Covid a imposé aux entreprises un recours massif au télétravail. Comment voyez-vous cette situation ? Pensez-vous qu’elle soit durable ?

Olivier de la Chevasnerie : Le télétravail a été un outil de politique sanitaire efficace pour limiter la propagation de l’épidémie dans les organisations. En le mettant en œuvre, les chefs d’entreprise ont ainsi joué leur rôle de garant de la santé de leurs collaborateurs. Après plus d’un an de crise sanitaire, le télétravail est devenu une réalité pour un grand nombre d’entreprises et sa mise en place n’a pas été sans conséquence sur l’organisation et la vie de l’entreprise.

Dans ce contexte, certains salariés aspirent à une évolution de leur environnement de travail afin de répondre à des attentes nouvelles et limiter les contraintes du quotidien : allègement des temps de transport, recherche d’un environnement de travail adapté (bureau fermé versus open-space), flexibilité des horaires, recherche d’une plus grande autonomie… A contrario, tous les salariés ne souhaitent pas non plus télétravailler, qui plus est à 100%, et le télétravail subi peut aussi engendrer des situations de mal-être (isolement, amplitude horaire, rupture du lien social, ergonomie défaillante…).

Avec la reprise de l’activité et le retour des salariés en entreprise, les chefs d’entreprise auront certainement à cœur de rester à l’écoute de ces nouvelles attentes tout en gardant à l’esprit plusieurs points essentiels :

  • toutes les entreprises ne sont pas en mesure de recourir au télétravail avec la même ampleur et elles n’ont pas toutes la possibilité de le rendre effectif pour tous leurs collaborateurs,
  • tous les salariés ne souhaitent pas, ou ne peuvent pas, être en télétravail,
  • Il existe une grande diversité des situations (secteur d’activité, taille de l’entreprise, nombre de salariés…) mais aussi des zones géographiques. En effet, les temps de transport ne sont pas les mêmes dans les métropoles que dans les villes moyennes ou les zones rurales.

Je suis convaincu que chaque chef d’entreprise prendra les mesures adaptées afin de trouver le bon équilibre entre les attentes de ses collaborateurs et la vie de l’entreprise.

Pouvez-vous nous présenter « l’Open-travail » ? En quoi cette nouvelle forme d’organisation peut-elle être bénéfique pour les entreprises ? Quel rôle les chefs d’entreprise peuvent-ils jouer dans sa mise en œuvre ?

Christophe Harrigan : A la lumière de la crise que nous avons traversée, et de l’efficacité avec laquelle La Mutuelle Générale a pu continuer à assurer son activité, nous avons voulu aller plus loin en mettant au point une organisation nouvelle que nous avons baptisée open travail. L’open travail, c’est une organisation du travail plus souple et plus efficace, dans laquelle c’est le collaborateur qui choisit son lieu de travail et l’organisation de son temps de travail, et c’est l’entreprise qui s’adapte à son choix, tout en mettant l’accent sur les actions de cohésion du collectif. Cette nouvelle organisation s’inscrit dans un cadre prescrit, négocié avec les organisations syndicales, elle repose sur le volontariat bien sûr, mais aussi sur la réversibilité des choix faits par les uns et les autres. L’open travail est un modèle gagnant – gagnant. Pour le collaborateur qui améliore son bien-être. Et pour l’entreprise puisque nous sommes convaincus que cette nouvelle organisation est source d’attractivité, de fidélisation et d’efficacité pour nos équipes. Le rôle des chefs d’entreprise est essentiel dans la bascule et la mise en œuvre d’un modèle de ce type mais une telle organisation nécessite beaucoup de co-construction avec les équipes et avec les organisations syndicales, ce que nous avons privilégié à La Mutuelle Générale.

Quels sont, selon vous, les éléments clés pour réussir cette transformation en entreprise ?

Christophe Harrigan : Je vois quatre facteurs clés de succès pour la mise en œuvre d’une nouvelle organisation de ce type. D’abord la confiance et la responsabilisation des équipes. La concertation, encadrée par un accord d’entreprise et des conventions de service au sein de l’entreprise. L’accompagnement, de toutes natures (RH, matériel, financier). Et enfin une grande vigilance sur le renforcement du lien social et le maintien de la cohésion, qui nécessitent de réinventer les rituels et les moments de convivialité au sein de l’entreprise.

Comment voyez-vous le manager de demain dans un monde qui change ?

Olivier de la Chevasnerie : Dans un monde incertain, traversé par de mutations fortes (impact des entreprises, évolution des modes de consommation, attentes des salariés…), le rôle du manager est devenu plus complexe, mais aussi plus central. On attend du manager de demain qu’il incarne la raison d’être de l’entreprise auprès des équipes et renforce la cohésion d’équipe, notamment en développant les liens entre les collaborateurs et l’ensemble de l’écosystème de son entreprise. Il aura un rôle de plus en plus structurant. Il devra être encore plus proche du terrain, écouter les nouvelles attentes de ses salariés tout en faisant vivre l’intelligence collective de ses équipes en mettant en valeur les talents
individuels.

Chez Réseau Entreprendre nous mettons la personne et la bienveillance au cœur de nos valeurs. Nous sommes persuadés que le manager de demain intègrera ces valeurs en mettant l’humain au cœur du projet d’entreprise. Ce sont ces valeurs que nous partageons avec notre partenaire La Mutuelle Générale.